
GÉRARD TARIDE
Libre comme l'Art...
Gérard Taride est un créateur atypique, loin du sérail de l’art contemporain. Formidable créatif il baigne depuis l’enfance dans la musique et l’art grâce à son père artiste lui-même, très proche de l’école de Nice mais aussi passionné et érudit de jazz, sa deuxième passion. Gérard grâce à lui a connu tous les grands du jazz qui dormaient à la maison quand ils venaient à la Grande Parade du Jazz de Nice, Dizzy Gillespie au petit déjeuner affublé d’une perruque empruntée dans la salle de bains, ça vous marque un gamin. Bernard, son père, l’amenait enfant très souvent avec lui quand il allait voir ses amis de l’Ecole de Nice : ainsi Gérard a-t-il découvert Arman et se rappelle de cette voiture que le nouveau réaliste fit exploser dans une carrière dans le cadre d’une performance … et tant d’autres anecdotes qui le marquèrent. Fahri lui aussi le marquera d’une manière indélébile avec ses collections de robots et d’objets tellement avant gardistes et originaux. Sosno avec ses premières oblitérations de photos issues de ses reportages de guerre le marqueront aussi.
Les performances artistiques des années 70, issues de l'École de Nice et du mouvement Fluxus, imprégneront Gérard de souvenirs marquants qui façonneront certainement son évolution créative.
Pourtant Gérard commence par le piano classique mais aussi la danse … Il participe en effet dès la prime enfance à des spectacles célèbres où les enfants montent sur scène. Mais très vite la batterie prendra le dessus et le mènera au conservatoire pendant les années lycée. Avec ses potes d’enfance ils montent un groupe. C’est le break, le premier. Il quitte tout : lycée, conservatoire, contraint car avec son groupe Plein Sud, les maisons de disques, les galas, tournées et TV se succèdent et s’enchainent. Le succès est au rendez vous et Gérard mène une belle carrière musicale pendant les années 80.
Nouveau break. Encore un carrefour inattendu. Que faire après cette agitation, les tournées etc… Gérard décide avec un membre du groupe et un autre musicien de monter une société de création de T-shirts. C’est le grand boom de l’époque. Il va dessiner les modèles et créer les motifs pour ces produits. Tiens, un retour aux arts plastiques, toujours malgré lui… Le design, c’est un peu de l’art mais c’est aussi concret. Et Gérard se débrouille, il apprend, il invente… Ça marche, d’une petite boutique sur la côte d’azur la structure devient nationale. Les trois amis se retrouvent à la tête de plusieurs boutiques. Mais la guerre du Golf arrive et fait effondrer leurs rêves.
Deux ans plus tard il rejoint son ami de toujours dans l’aventure d’une enseigne de meubles design et d’accessoires de décoration. C’est là qu’il apprend aussi bien la photo, le graphisme, la vidéo etc… Car il gère et crée beaucoup de choses : des modèles de mobilier, des accessoires déco, des catalogues, des scénographies pour les magasins et stands. Il commence aussi à cette époque à créer des « multiples » pour décorer les murs des pièces où se retrouveront les meubles et la déco qu’il a imaginée. Sans le savoir il suit les traces de Warhol, ex-publicitaire qui devint un des génies de l’Art Contemporain, qui lui aussi, fut très lié avec la musique. Il détourne certains matériaux et process grâce à ses fournisseurs : il choisit de faire des images sur un support à l’époque très innovant : le plexiglass. Le succès et au rendez-vous et il commercialisera ses images dans pas mal de réseaux de distributeurs nationaux et internationaux dans le domaine de la déco. Il passera plus d’une dizaine d’années à créer pour XXL, marque de meuble et de décoration, qui continue encore son chemin.
Encore un break, un nouvel épisode : fort de sa culture d’autodidacte dans les domaines de la création graphique, du design, de la scénographie, de la photo et de la vidéo, Il crée sa boite « Pure Design ».
Gérard Taride n’aura pas fait ses expériences de plasticien dans une école comme l’art contemporain l’a imposé. Il a gagné son savoir-faire par sa curiosité et dans les divers métiers créatifs qu’il a embrassés. Mais une rencontre va changer sa vie artistique : Simone Dibo Cohen, une amie de son père. Cette dame des Arts s’intéresse à lui et à ses images sur plexiglass. Elle organise des expos à l’époque chez un ophtalmologue et lui propose d’exposer. Why not ?
Pourquoi Gérard qui utilise toutes ses compétences au service du marketing ne reviendrait-il pas vers la création pure. Première exposition en 2008, tout est vendu. Simone est sidérée. Elle lui redemande de refaire une expo dans un cabinet du même ophtalmologue à Lyon et même résultat. Devenue Présidente de l’UMAM (Union Méditerranéenne de l’Art Moderne) Simone demande à Gérard de participer aux expositions de la Biennale au Musée Château Grimaldi de Cagnes sur Mer où sur deux sessions, il crée des installations. Ce concept l’attire car il fait appel à toutes les compétences qu’il a acquise au long de ce dédale créatif et professionnel qui l’a mené là. Il réalise ainsi un mix entre scénographie, musique, son, vidéo, photographie. Cette fois pour s’exprimer et non pour une simple opération marketing. Il détourne son propre savoir-faire pour s’en servir de porte-voix.
Simone croit en lui et lui propose alors de venir exposer à la Galerie Lympia au Port de Nice dans le cadre de « Liberté chérie ». Un protocole s’est installé entre eux : elle ne cherche pas à savoir ce qu’il présente. Alors qu’elle est très exigeante avec tous les autres créateurs. Ici sa création monte d’un cran: il traite des médias, de la censure, des fakes, de ce flot qui commence à affoler tout un chacun. Il parvient à démontrer que cette « fièvre » atteint tous les milieux. La violence des informations et leur diffusion, la rapidité du net, la profusion, le manque de repère qui mène à la confusion c’est : « la prison dorée », titre évocateur de cette prison que chacun bâti tous les jours et que ce flot d’information renforce. Cette installation est comme un pavé dans la mare. Gérard semble avoir trouver quelque chose qui l’attire encore plus vers l’art… Le public le remarque.
L’UMAM revient et cette fois au Château Musée Grimaldi à CAGNES SUR MER il signe une installation sur le thème « Moi Je » avec son père Bernard Taride : toujours ces micros, ces appareils photos, mais aussi les miroirs chers à son père. Une boucle semble être bouclée. L’émotion qu’elle produit pousse Simone Dibo Cohen à inviter Gérard en 2022 pour une exposition collective ExodeS qui s’étend dans plusieurs points de St Raphaël. Gérard choisit un endroit que personne ne veut : une sorte de night-club désaffecté sur la plage, qui ressemble à un blockhaus sombre. Il crée une installation « Les enfants perdus de l’Exode », sur les murs figurent les fiches de centaines d’enfants perdus dans le chaos de l’exode et dans le centre de cet espace sombre siègent des centaines d’oursons calcinés. L’installation est un coup de poing dans la mémoire, le faible éclairage lie tout un chacun à chaque petit visage et les oursons calcinés rappellent cette réalité historique crue, terrifiante et par trop oubliée. Le public, les critiques sont sidérés, émus, interpelés.
Gérard ayant obtenu le Prix de la Ville de Cagnes sur Mer lors de l’expo « Moi Je », est invité à investir le Musée de Cagnes sur Mer pour un one man show dans un espace incroyable. Il y présente en 2024 son expo NOTES INTERDITES. Et hasard ou destinée, le voilà qui réexpose à St Raphaël autour de la mythologie cette fois dans une chapelle. Il y présente son installation « Help Yourself » qui est une exploration audacieuse des frontières entre divin et quotidien , sacré et profane à travers un distributeur automatique de divinités.
Michel Sajn La Strada